JOHN BOLTON : le ridicule ne tue pas.

Le sang, le miel et le lait. *

Ainsi, selon John Bolton, ambassadeur américain à l’ONU, sur le plan moral, il n’y aurait aucune commune mesure entre ceux qui meurent au Liban sous les bombes israéliennes, et ceux qui meurent en Israël, sous la mitraille du Hezbollah.
John Bolton juge que ceux qui meurent dans une campagne présentée comme une réaction de légitime défense sont les victimes de seconde catégorie d’une action moralement justifiée, alors que les victimes qui tombent sous les fusées du Hezbollah sont des victimes de première catégorie d’une action moralement douteuse, d’une action classée comme « terroriste ».Ainsi, l’aveuglement a atteint ces proportions. L’image de l’autre est si dégradée et l’aveuglement si grand que John Bolton ne voit plus l’énormité de ses propos. Alors même que le monde entier réalise la disproportion entre la cause et l’effet, entre l’enlèvement de deux soldats et la destruction d’un pays ! Il y a là de quoi étouffer d’indignation ou mourir de honte.
Pourtant, Bolton aurait pu mieux s’informer, comme tout le monde. Il aurait pu allumer une télévision pour savoir que le sang répandu est celui des innocents, celui de familles entières gisant sous les décombres, celui de familles entières décimées comme des agneaux silencieux. S’il avait pris la peine de consulter l’Unicef, il aurait appris qu’un tiers des quelque 339 victimes des bombardements sont des enfants.
Que John Bolton le sache : ce sang répandu, c’est celui des humbles dont Dieu entend le cri, celui des humbles baptisés dans leur souffrance, qui n’auront de cesse que Dieu entende leur cri et leur rende justice.
Que John Bolton l’apprenne : c’est le sang du Liban qui coule là, c’est le sang qui se mélange au miel et au lait, celui du cèdre et du roseau, celui du Liban message au monde.
Non, ce n’est pas n’importe quel sang qui coule. C’est le sang de la vaillance, du courage, de la coexistence. Voilà le sang qui coule au Liban. Et ce sang est saint, parce qu’il coule des clous, des épines et des cordes, parce qu’il coule du bois rugueux dont est faite la croix.
C’est le sang du pardon qui coule, le sang qui lave et purifie, le sang des veilles, des jeûnes et de la prière, le sang de l’encens qui monte devant les icônes saintes. C’est un sang impur qui devient pur, parce qu’il lave l’offense et intercède pour l’ennemi, c’est le sang de la haine réduite en cendres, du pardon et de la rédemption.

* Article écrit par Fady Noun - L'orient le jour du 22-07-2006